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chdjamel
Description du blog :
Comment être journaliste en Algérie à la lumière de ce qui se pratique dans la presse d'ailleurs.
Catégorie :
Blog Actualité
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06.10.2007
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29.09.2018

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Radio et télévision : histoire d’un monopole

Radio et télévision : histoire d’un monopole

Publié le 04/02/2011 à 15:43 par chdjamel
Radio et télévision : histoire d’un monopole

Il y a une censure de l’expression politique imposée de fait, depuis 1992, aux courants d’opinion opposés au régime. Cette censure efficace, au-delà de ses aspects réglementaires et publics, s’exerce aussi de façon indirecte. Des mouvements sans aucune assise et sans aucun impact ont été présentés abusivement comme des partis d’opposition alors qu’ils ne constituent, en dehors de quelques formations connues, que des façades artificiellement différenciée de la même bureaucratie remise en selle par le recours à la force. L’état d’exception justifié par la lutte contre le terrorisme et imposé à tous, autorise toute forme de pressions discrètes et non avouées. Cette situation perdure même aujourd’hui. Et les médias lourds continuent à assumer ce «service public».

 

Par Achour Cheurfi (*)

1-la radio, une création relativement ancienne

Introduite en Algérie, à la fin des années vingt du XXe siècle, en même temps qu’en France, la radio est de création relativement ancienne par rapport au reste des pays arabes et ceux du Maghreb. Tunis a eu sa radio en 1938 alors qu’Alger a eu son premier Centre d’Emission de faible puissance en 1929 (en même temps que Rabat), Constantine et Oran en 1940. Un émetteur de faible puissance fut implanté à Alger en 1942 puis un à Oran en 1943. L’extension de la radio s’est poursuivie par la mise en service d’un émetteur de 200 watts à Annaba.

Du point de vue technique, de 1929 à 1957, la radio n’a pas connu un développement important puisque les zones couvertes par les émetteurs étaient relativement modestes et étaient limitées aux grandes localités telles que Oran, Alger, Constantine et Annaba et seules quelques riches familles pouvaient se permettre l’acquisition d’un poste radio.

Du point de vue de l’impact et de l’audience, ce n’est qu’à partir de 1943, date à laquelle on commença à diffuser en langue arabe, que la radio acquiert un début de popularité. En 1948, on ouvre des studios pour produire des émissions en arabe et en kabyle. Toutefois, ce n’est qu’avec le déclanchement de la Révolution que la radio s’introduit réellement dans les foyers algériens. Et ce n’est guère un hasard si en 1957, la puissance des émetteurs a été augmentée atteignant 322 kw lors qu’elle n’était que de 25 en 1946. L’engagement d’une nouvelle politique de développement de la Radio n’était nullement désintéressé, car en relation avec l’évolution de la guerre de libération.

Les autorités coloniales utilisaient, depuis le début de la guerre de libération, la radio pour orienter l’opinion publique nationale et internationale. Elles en usaient en tant qu’arme de propagande, pour démoraliser la population algérienne. Toutefois, elles s’étaient rendu compte que cet usage était à double tranchant et que les auditeurs algériens, de plus en plus nombreux, écoutaient la radio coloniale, surtout les émissions artistiques en arabe et en kabyle, mais n’accordaient que très peu de crédit aux informations distillées et accueillaient celles-ci selon leur propre grille de lecture. D’où la panique qui s’était emparée des concepteurs de « la guerre psychologique » qui avaient lancé l’émission de propagande «La voie du Bled» dès janvier 1957.

Au 31 décembre 1946, il n’existait en Algérie que 125 000 auditeurs dont 11 000 Algériens et 114 000 Européens. Au 31 décembre 1956, il y en avait 358 000 dont 127 000 Algériens et 231 000 Européens. En dix ans, le nombre total des auditeurs a triplé ; celui des Européens a doublé mais celui des Algériens a plus que décuplé. Ce qui suscita l’inquiétude de l’administration coloniale qui a interdit la vente des radions, sous réserve de production d’un bon délivré par la sécurité militaire ou les services de police. Car parallèlement aux armes, le FLN venait de déclencher la guerre des ondes.

2-la radio de la résistance

L’écoute collective demeure souvent la règle avant que les autorités coloniales ne soumettent l’acquisition d’une radio à des procédures très contraignantes. La relation des faits de la Révolution se faisait à partir du Caire dès 1955 (Sawt Al Arab), de Tunis et de Damas dès 1956 (El Djazair Atha-Ira), de Baghdad (Sawt Athawra Al Djazairia), de Tripoli dès 1958. Le réseau extérieur fut même renforcé par la création de plusieurs station parmi lesquelles celle de Pékin, Benghazi, Accra, Conakry et Rabat etc. Mais c’est la radio clandestine algérienne qui a commencé à émettre au mois de décembre 1956, à partir du Maroc, qui a eu beaucoup d’impact sur la population algérienne.

La question de pouvoir disposer d’une radio au service de la Révolution algérienne semble avoir fait l’objet de discussions intenses au Caire entre la Délégation algérienne et les autorités égyptiennes. A un certain moment, il a été même envisagé qu’une radio « algérienne » puisse être abritée par les services de renseignements égyptiens. Et si en fin de compte l’idée même d’une radio algérienne au Caire a fini par être abandonnée, à aucun moment, algériens (du Caire) et égyptiens n’avaient envisagé une radio algérienne installée sur le terrain même du conflit, dans le champ de bataille, du fait des immenses risques encourus.

L’opération n’est pas seulement difficile du point de vue technique, mais il aurait fallu, se disait-il alors toute une armée pour assurer sa sécurité contre les bombardements ou les brouillages. C’est finalement Abdelhafidh Boussouf qui a tranché en optant pour l’installation d’une radio ambulante au Nador. Le défi n’était pas seulement d’ordre technologique mais également militaire. Car il fallait non seulement transformer les équipements qui servaient aux transmissions militaires secrètes en diffuseurs et amplificateurs mais aussi et surtout défendre les installations contre les attaques aériennes de l’ennemi. Ce défi a été levé grâce à une fédération d’énergies libérées par la conviction révolutionnaire.

A partir d’appareils de transmission de fabrication américaine, notamment ceux qui servaient à relier les grandes unités sur des distances éloignées, les techniciens algériens moyennant quelques aménagements ont pu mettre sur pied une radio clandestine ambulante qui commença ses émissions le 16 décembre 1956. Cette radio débutait ses programmes par l’expression : «Ici la radio de l’Algérie combattante » ou bien « La voix du Front de Libération s’adresse à vous, du cœur de l’Algérie».

Diffusés en arabe, en français et en kabyle, les programmes comportaient des communiqués militaires, des commentaires politiques ainsi que les démentis à la propagande coloniale et autres programmes à caractère propagandiste et mobilisateur. Animée par des militants comme Aïssa Messaoudi, Madani Haouès, Abdelmadjid Méziane, Hachemi Tidjani, Mohamed Bouzidi et bien d’autres, son efficacité était telle que pour limiter son impact, les autorités coloniales ont eu recours à tous les moyens et particulièrement la confiscation des postes au cours des razzias, le brouillage, la diffusion d’émission pirates et bien entendu les bombardements. Le FLN de son côté voulait détruire la Radio française en Algérie mais s’il arrive à causé des dégâts importants aux installations techniques par l’explosion de bombes à retardement, les émissions reprennent assez rapidement. Outre ses moyens brutaux utilisés pour briser la voix de l’Algérie combattante, la France coloniale a eu recourt aux autres moyens relevant de la guerre psychologique. Comme la création d’émissions spéciales dont l’intitulé pourrait induire en erreur l’auditeur algérien. C’est ainsi qu’est lancée Saout Al Djazaïr (la voix de l’Algérie), une émission diffusée par la chaîne parisienne France 2, tous les soirs, à 22h, à partir de janvier 1960. Relayée par des émetteurs de province sur 19 à 25 mètres, elle est le produit d’une station clandestine crée dans le domaine de la Chintraie, à Jouy, dans l’Eure-et-Loir. Confiée à un certain Bestos, à la fois conseiller technique du cabinet Jacques Soustelle, ministre de l’information de de Gaulle et membre du service de Documentation et de Contre-espionnage (SDECE), la station était destinée au départ à produire des émissions d’intoxication, une sorte de fausse Voix des Arabes ou a brouiller les Voix de l’Algérie diffusée par le FLN depuis Le Caire ou le long des frontières tunisienne et marocaine par des postes fixes et mobiles.

La radio de la résistance a connu essentiellement deux grandes phases. La première, allant de sa création jusqu’en 1959, s’est caractérisée par les moyens modestes utilisés et la faiblesse des capacités d’émission qui contraignent à une diffusion directe dont le rythme est difficile à maintenir. La seconde phase, plus développée, débute à la fin de l’année 1959, avec des équipements plus puissants, met fin à la diffusion directe et ouvre toute grandes les immenses possibilités de l’enregistrement des émissions sur bandes. Ce qui permet une programmation plus rationnelle et un travail plus élaboré.

3-Après l’indépendance, de grands efforts mais…

La Radiodiffusion Télévision Algérienne (RTA) est née le 28 octobre 1962, quelques mois à peine après la déclaration d’indépendance. Héritant du patrimoine de l’ORTF dont elle était une antenne régionale, la RTA diffusait à cette époque trois programmes radiophoniques sur des émetteurs de faible puissance en modulation d’amplitude et trois programmes télévisuels régionaux à Alger, Oran et Constantine. Devant la faiblesse des moyens de diffusion, la RTA a entrepris à partir de 1965 l’installation des émetteurs radio de grande puissance pour assurer une meilleure couverture du territoire nationale et diffuser des programmes internationaux à destination de l’étranger. Le 19 juin 1970 a vu l’unification du réseau télévision avec l’installation d’un réseau de faisceaux hertziens sur le nord du pays acheminant le programme de télévision en noir et blanc et les programmes radiophoniques vers les nouveaux émetteurs. Le sud du pays s’est vu doté d’un réseau d’émetteurs radio et télévision recevant les programmes d’Alger via satellite Intelsat. Parallèlement au renforcement des moyens de diffusion, la RTA a entrepris la construction de nouvelles maisons de la radio et de la télévision dans les centres régionaux à Constantine, Oran et Ouargla. En 1973, une autre étape a été franchie avec la coloration des studios de production et de diffusion TV. La RTA a adopté le standard 625 lignes norme PAL.

A l’instar d’autres entreprises du pays, la RTA a fait l’objet en 1986 d’une restructuration qui a donné naissance à quatre entreprises à savoir : l’Entreprise de radiodiffusion sonore (ENRS), l’entreprise nationale de Télévision (ENTV), l’entreprise nation de télédiffusion (ENTD) et l’entreprise nationale de production audiovisuelle (ENPA). Si cette dernière a été dissoute en 1997, l’ENRS a été érigée en 1991 en Etablissement public à caractère industriel et commercial (Epic) avec dénomination «Radio Algérienne». Au lendemain de sa création, la Radio a entrepris un vaste programme de développement destiné à renforcer les moyens techniques existants, renouveler les équipements arrivés en fin de vie opérationnelle, créer de nouvelles stations de radios locales. Elle est placée sous la tutelle du ministère de la Communication et de la Culture.

Le réseau de diffusion des programmes des quatre chaînes nationales (I, II, III et IV) et des radios locales est constitué de quatre stations en Ondes Moyennes de moyenne puissance : Ouled Fayet (Centre) ; Ain Beida (Est) ; Sidi Hamadouche (Ouest) et Béchar (Sud-ouest) et de trois stations en longues ondes de grandes puissances : Tipaza (Centre) ; Béchar (Sud-ouest) et Ouargla (Sud-est). A cela, il faudrait ajouter un réseau complémentaire de petites stations en ondes moyennes de faible puissance réparties dans certaines localités importantes du sud du pays pour la diffusion de la chaine nationale I ; un ensemble de moyens de diffusion constitué d’émetteurs en ondes courtes destinés à la couverture internationale vers l’étranger concentrés au centre de Bouchaoui et un réseau de station d’émission pour la diffusion des radios locales.

La radio diffuse ses différents programmes en arabe, berbère, français, espagnol ou anglais. Malgré la multiplication des antennes paraboliques dans le pays, le média résiste et rêve de conquérir d’autres territoires. Déjà sur satellite et Internet, il vise la France et l’Afrique. La chaîne 1 est arabophone (arabe classique et dialectal), la chaîne 2 est d’expression berbère, à majorité kabyle, bien que tous les dialectes du berbère soient représentés, et la chaîne 3 est en français avec une heure d’anglais et une heure d’espagnol. Ce sont des chaînes généralistes.

A Alger, il y a trois chaînes thématiques : El Bahdja, à destination des jeunes, axée sur la musique et le sport, Radio Culture, qui émet sur le Moyen-Orient via Arabsat et Radio Coran, qui a été mise en place pour contrer certaines dérives religieuses. Il y a aussi plus d’une trentaine de radios locales qui avaient pour principal handicap de posséder des émetteurs trop faible pour couvrir de grandes distances mais dont certaines ont déjà une portée régionale et diffusent sur des rayons de 200 à 300 kms.

Ainsi, avec ses trois chaînes principales, ses chaînes thématiques et locales, la radio couvre quasiment tout le territoire national. Présente sur Internet, elle se prépare à diffuser ses programmes vers la France et vers l’Afrique. Les efforts consentis par l’Etat ont porté, durant près de quarante ans, sur le renforcement de la cohésion nationale et la transmission de son message le plus loin possible et en direction, en premier lieu, de sa communauté installée à l’étranger. Même si du point de vue de gestion informationnelle, la radio, encore loin du service public qu’elle est sensée assurer, a connu plutôt une évolution chaotique.

4-Une évolution chaotique ?

La naissance de la RTA, sigle qui englobe la radio et la télévision nationales, se fait dans l’euphorie de l’indépendance. C’est même le premier geste d’une souveraineté reconquise. En 1962, quelques techniciens algériens formés à l’ORTF prennent la relève et assurent la diffusion des nouveaux programmes (1). Diffuser onze heures quotidiennes en langue française, dix-huit heures quotidiennes en langue arabe, onze heures quotidiennes en langue kabyle, plus deux heures en langues espagnole et anglaise, sans parler des programmes politiques de la Palestine, de l’ANC (Afrique du Sud) et un peu plus tard ceux des Chiliens exilés et des Sahraouis, c’est le grand défi de la radio algérienne qui est mise au service d’un objectif noble : la décolonisation. C’est d’ailleurs le discours dominant du pouvoir comme de l’élite. Le progressisme et l’anti-impérialisme constituent le menu quotidien. L’une des animatrices les plus célèbres de la radio qui a longtemps accompagnée le poète Djamel Amrani, Leïla Boutaleb, témoigne : «Officiellement, l’Algérie était engagée dans la voie du socialisme. Par exemple : La mère de M. Gorki était lu tous les jours sous forme de feuilleton radiophonique par un français, ancien porteur de valises du réseau Jeanson, resté en Algérie jusqu’en 1970. Jean Sénac, poète algérien engagé, était écouté sur tout le territoire et Fanon représentait un repère puissant. L’histoire africaine, celle de ses leaders, le Che, Cuba, le Viêt-Nam, les pays d’Amérique latine dans leur ensemble, tout cela imprégnait nos programmes et nourrissait nos idéaux. Au plan de la culture, de l’information, nous clamions les valeurs du socialisme (justice sociale, solidarité, réformes sociales, etc.). A l’intérieur de ces grandes options, le journaliste pouvait insérer ses convictions personnelles : liberté d’expression, universalité» (2).

Le débat sur la charte nationale en 1976 qui a duré un mois et qui a permis un défoulement collectif, du moins au niveau de la presse écrite, n’a pas eu de prolongement au niveau de la radio où le montage ne retenait que la problématique officielle de la conciliation entre socialisme et islam, évacuant l’exercice des libertés et la question de la démocratie, thèses jugées bourgeoises et libérales. Une fois cette parenthèse refermée et la Charte plébiscitée par voie référendaire, le travail quotidien, celui de la censure, de l’autocensure, de la glorification reprend. Et les responsables plus soucieux de mesurer la fidélité des hommes que la qualité de leur travail sévissent de nouveau lors que la bande magnétique achetée en devise devint denrée rare à telle enseigne que les producteurs de la radio sont acculés à réutiliser les mêmes bandes jusqu’à usure totale, faisant ainsi disparaître un mémoire réelle.

La relative liberté dont jouissaient les programmes culturels car considérés comme non politiques au premier degré, contrastait avec le contrôle quasi absolu de l’information qui privilégiait la langue de bois. Cette démarche restait valable même après l’avènement du pluralisme en 1989 : «Discours simpliste-discours triomphaliste : le journaliste devait offrir à l’auditeur une vision idéalisée, aseptisée, uniformisée. La vocation pédagogique et éducative était exclue au profit d’une simple transmission propagandiste. Par calcul politique, on pouvait assister à des périodes de dégel relatif, dans lesquelles s’engouffraient les journalistes épris d’expression plus libre (…) Seule la presse a profité de larges espaces de liberté. La radio pour sa part continue de censurer au nom cette fois-ci de na notion de service public» (Leïla Boutaleb).

A-Une audience confirmée

Les sondages réalisés jusque-là attribuent à la radio avec ses différentes chaînes une audience respectable malgré ou à cause du monopole étatique encore en vigueur en 2008. Les résultats de l’enquête réalisée en 2005 par la société française «International media and market research» (Immar) et dont les résultats ont été rendus publics le 2 avril 2006 ont montré que la radio algérienne, avec ses trois chaînes, se distingue par un «très bon» service, à la fois national et local, enregistrant ainsi une audience de 78,3% durant l’année 2005 (…)

Sur un audimat de 20 millions, quelques 4 millions d’auditeurs écoutent les chaînes des radios locales. Cette performance qui place la Radio au rang de support médiatique le plus important du pays, le directeur général de l’ENRS (Entreprise nationale de la radiodiffusion sonore), l’explique ainsi : «On a d’abord essayé d’algérianiser au mieux la chaîne I d’expression arabe, de donner une envergure nationale à la chaîne II avec la plupart des variantes de la langue amazighe et de renforcer la chaîne III d’expression française. » Avec ses 20 millions d’auditeurs, un résultat très discutable tant que les détails du sondage ne sont pas rendus publics, la Radio nationale vient de se réapproprier l’espace des ondes algériennes, ce qui n’était pas le cas il y a quelques années, quand des radios étrangères, notamment marocaines, attiraient l’auditeur algérien. En outre, il faudrait sans doute relever ici la place singulière d’occupe la radio El Bahdja qui rayonne sur le centre du pays et dont l’audience dépasse largement celles des radios nationales puisqu’elle revendique, en 2006, plus de 8 millions d’auditeurs.

B-les radios régionales ou locales : la démarche des pouvoirs publics

Il existe trois chaînes nationales et 33 radios régionales en 2006. La première radio régionale, celle de Béchar (suivie de radio Mitidja), commence à diffuser le 20 avril 1991, mais plus de la moitié à vu le jour depuis l’an 2000. A l’évidence, la place d’occupent les radios régionales dans le spectre national ne cesse de prendre de l’importance. Sur les 182 000 heures d’émission débitées chaque année, 100 000 émanent des radios locales. (3)

La démarche poursuivie par les pouvoirs publics est de doter chaque wilaya d’une radio avec une priorité pour les zones frontalières et enclavées et les grands pôles industriels et commerciaux (4). Pour cette opération, l’Etat a mobilisé (entre 2000 et 2005) une enveloppe de 200 milliards de centimes dont 50 milliards ont été consacrés au fonctionnement. Une autre enveloppe financière de 63,8 milliards de centimes a été également consacrée à l’introduction du numérique, au cours des cinq prochaines années, dont 13,8 milliards ont été débloqués en 2005 pour le basculement de la diffusion analogique à la diffusion numérique. En contrepartie, il est attendu d’elles qu’elles promeuvent à la fois l’information de proximité pour «refléter fidèlement les développements sociaux-économiques » tout en recherchant de nouvelles opportunités dans le domaine de la publicité. Leur mission culturelle résiderait dans la promotion des « dialectes locaux, vecteurs essentiels de l’identité nationale» (5).

Lors du deuxième séminaire national sur les radios régionales qui a eu lieu à Ouargla au mois d’avril 2005, il a été exposé aux participants les résultats d’un sondage réalisé par l’Institut Abassa. Les conclusions font état de 20 millions d’auditeurs de la radio algérienne, avec ses différentes structures, dont 4 millions pour ses seules radios régionales. Il s’agit d’une « reconquête » de l’espace hertzien national par la radio algérienne dans son ensemble, faisant chuter les taux d’audience de radios internationales auparavant très écoutées pour avoir été pratiquement seules à des taux aujourd’hui inférieurs à 10%. Cette offensive permet certes d’envisager avec assurance des projections de diffusion internationales des programmes, notamment en direction des pays voisins du flanc Sud du pays mais pourrait également servir d’argument pour reporter indéfiniment la question de la libéralisation des ondes.

5-La télévision : des débuts très modestes

Les débuts forts modestes de la télévision datent du 24 décembre 1956 avec la mise en place d’une station de diffusion située à Tamentfoust, à 20 km à l’est d’Alger (la télé fait son entrée au Maroc le 3 mars 1962 et en Tunisie en 1966). La puissance de l’émetteur était de 3 kw avant de passer à 20 kw en 1957. Seul Alger et ses environs immédiats sont couverts avec en moyenne 31 heures par semaine, en français et en arabe. Utilisée comme moyen de propagande, cette station qui utilisait 16 journalistes dont 5 cameramen, ne servait, dans un premier temps, que de relais à la télévision française avant de réaliser sur place le «Journal télévisé» à partir des bandes envoyées par United Press et France Vidéo et devenir le porte-parole des gros colons et de la minorité européenne en Algérie. En 1960, on procéda à l’ouverture des stations d’Oran et de Constantine. A la fin de l’année 1957, le nombre des téléspectateurs, quasi-exclusivement européens, est estimé à 6000 environs.

Ce service restreint de télévision fonctionnait selon les normes française 918 lignes. Il s’est développé jusqu’en 1962, autour de trois centres de production d’Alger, Oran et Constantine. Des stations d’émission de faible puissance étaient mises en service dans ces trois régions et diffusaient des programmes locaux et en différé. En deux décennies (70-80), les progrès réalisés par la Radio et la Télévision, sur les plans de l’équipement et de l’infrastructure, sont considérables par rapport aux structures laissées en place à l’indépendance.                       

Le 19 juin 1970, le réseau national de télévision fut unifié et l’ensemble des populations du Nord du pays pouvait capter les émissions de télévision. Un programme unique pour l’ensemble du pays était diffusé de Tlemcen à Souk Ahras. Depuis cette date, ce réseau a été complété par les émetteurs de Metlili, de Nador, de Mecheria et d’Aflou, permettant ainsi une amorce vers le Sud.

L’Algérie dispose depuis le 27 février 1975 d’une couverture du Sud algérien en télévision grâce à l’acheminement du signal par satellite. Au 1à mars 1978, les stations suivantes ont été reliées par satellite à la Maison de la Radio d’Alger et reçoivent le programme national de télévision : Béchar, Ouargla, El Oued, Ghardaïa, In Salah, Tamanrasset, Djanet, Tindouf, Adrar, Beni Abbas, Timimoun et El Goléa. Le réseau faisceaux hertziens comprend, à partir du Centre Nodal de Bouzaréah, trente stations intermédiaires terminales studios, émettrices TV ou radio. A partir de Bouzaréah, ou trouve deux artères Est et Ouest, qui forment l’épine dorsale dans la partie Nord du territoire national complétées par trois bretelles descendant à l’intérieur du pays. Comme il existe également des circuits internationaux formant des connexions dans toutes les directions. Une année plus tard (1979), la télévision entre de plein pied dans la couleur et rénove ses équipements.

6-La télévision satellitaire :

En 1986, la radio se sépare de la télévision. Cette dernière s’ouvre à la publicité dès le début des années 90 et développe une action plus offensive vis-à-vis de l’étranger et particulièrement vers la communauté nationale installée en Europe et dans le Monde arabe en privilégiant, au niveau de la programmation, le double aspect de l’information et de la culture. La première, ayant un but politique résidait dans le fait de donner une autre image du pays que celle de la violence et la seconde visait à mieux consolider l’encrage des publics ciblés. C’est ainsi que Canal Algérie, chaîne généraliste en langue française, orientée vers l’Europe, voit le jour en 1994. Elle sera diffusée selon le système analogique depuis le 28 août 2001 et disponible sur le réseau câblé français Noos depuis juin 2002. Une troisième chaîne, A3C (Algerian Third Channe), en langue arabe, orientée vers le Monde arabe et utilisant le satellite Arabsat voit le jour le 5 juillet 2001 (6).

Les objectifs recherchés par la diffusion internationale de ces programmes obéissent à des considérations d’ordre politique et culturel auxquelles se greffent des intérêts de nature économique et commerciale. Mustapha Bennabi, l’un de ceux qui ont contribué au lancement de ces chaînes, résume bien ces objectifs. «Il s’agit en priorité, écrit-t-il, de porter l’image et la voix de l’Algérie sur la scène internationale afin de contrebalancer les effets ravageurs de la propagande anti-algérienne développée à l’étranger et de l’information tendancieuse, partiale, tronquée,…prodiguée, sciemment ou par ignorance, par certains grands médias audiovisuels internationaux. Sur le plan culturel, il s’agissait non seulement d’entretenir les liens identitaires avec la communauté algérienne émigrée mais aussi de s’associer au dialogue et à l’échange entre les cultures et les civilisations. Enfin, dans le domaine économique, la chaîne internationale peut, dans le cadre des mutations en cours, contribuer efficacement à l’incitation à l’investissement en Algérie et à la promotion du produit algérien sur les marchés extérieurs. De même que cette chaîne internationale peut générer des sources propres considérables, publicitaires ou autres, en investissant dans les gisements inexploités du marché international de la télévision».

7-De l’analogique au numérique :

Après la diffusion par le biais du satellite, la télévision algérienne envisage dès 2007 de franchir un nouveau pas dans la voie de sa modernisation en adoptant le système numérique ou la TNT. C’est quoi la TNT ? L’appellation « télévision numérique terrestre » recouvre une mutation technologique qui étend le principe de la numérisation du signal à sa diffusion par voie terrestre, sur le modèle utilisé par les réseaux câblés ou les bouquets satellitaires. C’est un mode de diffusion terrestre dans lequel les signaux vidéos, audio et de données ont été numérisées, puis ordonnées dans un flux unique, avant d’être modulés puis diffusés, donc, transportés jusqu’au téléspectateur via les ondes électromagnétiques. Outre les qualités d’image et de son reconnue au numérique, la TNT permet la multiplication du nombre de chaînes émises par voie hertzienne terrestre. Alors qu’en mode analogique, seules quelques chaînes sont censées être réceptionnées en mode numérique, les réseaux de fréquences autorisent la réception d’une trentaine de services de télévision à vocation nationale. La transition de la télévision analogique vers la télévision numérique terrestre constitue une immense évolution technologique qui s’impose dans les champs algériens de diffusion dès 2006 (7). Un plan de stratégie nationale de télédiffusion numérique a été présenté devant la Conférence de l’Union internationale des télécommunications (UIT) en mai. L’accord de l’UIT est d’autant plus indispensable qu’il permet, grâce à un plan de « partage équitable » des spectres de fréquences pour tous les pays qui font partie des régions européennes, africaines et arabes, de démarrer la diffusion de la TNT en évitant la création d’interférences vers les pays limitrophes. En Algérie et selon ce programme, l’introduction de la TNT se fera en premier lieu dans les grandes villes, à savoir Alger, Constantine et Oran ; l’analogique continuera à fonctionner, en parallèle, jusqu’à sa disparition totale. Des appels d’offres sont lancés après la conférence de Genève pour l’acquisition de trois stations régionales et des moyens techniques. La TNT doit être considérée comme une réalité d’ici 2012. Le premier multiplex algérien présenté à la conférence de l’UIT, comprend six chaînes de télévision, à savoir Canal Algérie, A3 et la nationale avec les projets de trois chaînes thématiques (la culture, l’économie et le savoir). Une enveloppe de 13 milliards de dinars a été dégagée pour la réalisation de plusieurs projets dont la construction d’une maison de la télévision pour « loger » ces chaînes, ainsi que l’achat des équipements nécessaires à l’utilisation de la TNT.

8-Dès 2008 ? Dès 2009 ? Dès…

L’entreprise nationale de télévision algérienne prévoit, à l’horizon du premier 2008, le lancement de la diffusion de trois chaînes thématiques, relatives à la culture, l’économie et le savoir (8). La chaîne Algerian busness TV diffusera une série de programmes consacrés aux questions économiques et financières et assurera, durant six heures de transmission quotidienne, entre 17h et 23h, des journaux télévisés, des débats et des bulletins d’informations. Les deux autres chaînes, à savoir la chaîne amazighe et celle du savoir et de la connaissance, dont les études de projets sont terminées, comporteront des programmes destinés respectivement à un public berbérophone et à la frange des jeunes. Le lancement de ces trois chaînes permettra la mise sur pied du premier multiplex parmi les multiplex prévus pour l’introduction de la TNT en Algérie. Ainsi et pour des raisons techniques-un multiplex doit comporter six chaînes de télévision-, les trois chaînes en question accompagneront les trois chaînes existantes, à savoir Canal Algérie, A3 et la Nationale. Un projet de télévision régionale limité à 13 wilayas du Centre est en phase expérimentale.

A-Une position monopolistique 

Si aussi bien la radio que la télévision évoluent du point de vue technique et ne cessent de se diversifier, les deux occupent une position monopolistique et demeure propriété de l’Etat. Les quatre projets de chaînes de télévision privées et les vingt autres de stations radio, déposés au Conseil Supérieur de l’Information en 1993, n’ont jamais vu le jour. Pis, la même année, cette institution de «régulation» a été dissoute et le ministère de la Communication et de la Culture rétabli après le court intermède hamrouchien. La libéralisation qui a touché pratiquement tous les secteurs, y compris dans l’audiovisuel, concernant le cinéma ou la production des programmes télévisuels, n’a pas encore pénétré la radio et la télévision. Et pour cause, la loi de 1990 sur l’information ne prévoyait pas l’ouverture de la radio et de la télévision au privé.

Le programme du gouvernement Ouyahia formé au lendemain des élections présidentielles du 8 avril 2004, a adopté une position très claire sur la question. La création de radios et de télévisions privées est reportée pour une période « transitoire» indéterminée. L’accent est mis sur le développement et la modernisation des capacités de la télévision nationale, de la radio et de l’agence de presse. Dans le cadre « de la responsabilité de l’Etat », la libéralisation du champ audiovisuel est exclue. Le gouvernement justifie cette position en évoquant l’expérience pluraliste dans le domaine de la presse écrite qui a « révélé des dérives possibles par le fait de l’idéologie, des lobbies et autres phénomènes». La phase transitoire ouverte doit être utilisée pour « développer et consolider la professionnalisation et l’éthique avant d’être étendue aux médias dits ‘lourds’».

B-La télé c’est le pouvoir !

L’argument de la fragilité du pays après la «tragédie nationale» qui sert à justifier le maintien du monopole sur la radio et la télévision est-il recevable ? Le fait de consolider les médias publics lourds est une tâche tout à fait compréhensible, ce qui l’est moins, c’est le refus obstiné de ne pas le faire dans un environnement pluraliste. Bien évidemment, les « dérives possibles » de l’idéologie ou des lobbies ont beaucoup plus de chance d’être évitées et combattues dans un contexte de liberté que dans un contexte de semi-libertés. Car jusqu’à présent, et cela dure depuis l’indépendance, les moyens d’information lourds ont servi d’instruments entre les mains du pouvoir et n’ont présenté aux divers publics qu’une propagande à sens unique d’où le débat contradictoire a été exclu et les opinions qui diffèrent ou contredisent celles émises par le pouvoir et ses relais ne sont pas tolérées. Il y a une censure de l’expression politique imposée de fait, depuis 1992, aux courants d’opinion opposés au régime. Cette censure efficace, au-delà de ses aspects réglementaires et publics, s’exerce aussi de façon indirecte. Des mouvements sans aucune assise et sans aucun impact ont été présentés abusivement comme des partis d’opposition alors qu’ils ne constituent, en dehors de quelques formations connues, que des façades artificiellement différenciée de la même bureaucratie remise en selle par le recours à la force. L’état d’exception justifié par la lutte contre le terrorisme et imposé à tous, autorise toute forme de pressions discrètes et non avouées. Cette situation perdure même aujourd’hui. Et les médias lourds continuent à assumer ce « service public».

Souvent quand on dit pouvoir, on pense à la présidence de la République, même si dans la réalité, les multiples centres de décision ont chacun une influence certaine sur ces médias. Et c’est une personnalité politique, très au fait de la manière dont ces médias sont instrumentalisés, qui se livre, évoquant un moment singulier, celui de la crise momentanée qui avait eu lieu entre le Président Chadli Bendjedid et Kasdi Merbah, son chef de gouvernement, en 1989.

«A l’époque de Chadli, soutient-il, s’est produit des choses étranges qui sont restées ignorées des gens de l’information et de la politique. Il y avait un conflit aigu entre la Présidence d’une part, représentée par Mohamed Mokaddem, responsable à l’information, et Mouloud Hamrouche, secrétaire général, et le gouvernement d’autre part représenté par Kasdi Merbah, premier ministre. En effet, les services de la Présidence monopolisaient l’information à leur seul profit, en particulier à la télévision, et on ne montrait que les aspects négatifs de l’action du gouvernement de Kasdi Merbah. Il y a eu donc une crise sérieuse à propos du contrôle de l’information et pour savoir qui avait légitimement le droit d’utiliser cet appareil. J’étais opposé à de telles pratiques, je les ai dénoncées publiquement à l’époque et j’ai, en tant que ministre de l’Intérieur, informé le Président. Mais il n’est pas intervenu car l’information ne constituait une priorité pour lui.»

L’évolution extraordinaire des technologies de l’information et la multiplication des systèmes de diffusion (satellites, Internet, GSM), sont un défi pour la mentalité archaïque du parti unique. La machine de censure n’a plus les moyens appropriés pour réagir et ne peut rien faire ni techniquement, ni humainement pour empêcher la diffusion de ces médias ou pour restreindre l’accès de la population à ces nouvelles technologies de l’information. Aussi garder la main haute sur les médias audiovisuels classiques, plus puissants et plus influents sur la vie politique, économique et sociale du pays d’autant plus qu’ils touchent toute la population locale, surtout la moins instruite qui constitue la majorité, relève beaucoup plus du calcul politicien que d’une réelle volonté d’élargir et de consolider les libertés publiques.

(…)

De l’avis des experts, les principes fondamentaux d’un vrai service public sont les suivants : la couverture de l’ensemble du territoire national ; l’attachement à l’identité et la culture nationales ; l’indépendance du service vis-à-vis de l’emprise de l’Etat et de l’influence des intérêts privés ; l’impartialité des programmes, leur diversité et leur financement suffisant entre autres par les consommateurs. Appliqués au cas algérien (comme au reste des pays du Maghreb), on est loin encore d’atteindre le vrai service public. Si la couverture nationale est atteinte aussi bien par la radio que par la télévision avec même un souci de s’adresser aux communautés installées dans d’autres pays du monde, la confusion savamment entretenue entre le service public et le service étatique continue de constituer un sérieux handicap pour le passage vers un vrai service public. Encore faut-il reconnaître que depuis l’avènement du pluralisme politique, l’exercice de la liberté d’expression a fait un grand pas en avant et qu’aujourd’hui l’exigence veut que cela soit étendu aux médias lourds parce qu’ils touchent non pas l’élite (à l’image de la presse écrite) mais la majorité de la population au sein de laquelle l’analphabétisme demeure important.

Trois grandes phases principales ont caractérisé l’évolution de l’usage des médias dans notre pays depuis l’indépendance. La première durant laquelle l’ensemble des médias, lourds et légers, est mis au service de la construction de l’Etat-nation et de la création d’un consensus politique autour de l’élite au pouvoir qui avait obtenu la confiance du peuple grâce au combat contre le colonialisme. La population est conviée à une participation passive aux projets de développement économique. L’échec des politiques de développement et le durcissement du pouvoir ont coïncidé avec une fonctionnarisation et une bureaucratisation des médias devenus de purs instruments de propagande, de manipulation et d’encadrement. Le public n’aucune possibilité d’accès à des sources d’information différentes. Cette période prend fin, schématiquement, pour l’Algérie, au début des années 80 après le décès du président Boumediene et l’arrivée du président Chadli Bendjedid. La presse écrite tente de s’ouvrir sur la société même si son statut demeure étatique. C’est la période durant laquelle on relève un net changement de ton dans l’hebdomadaire Algérie Actualité et la création de journaux du soir «plus légers » comme les quotidiens Horizons et Al Massa en 1985 (9). Le pouvoir en mal de légitimité tente ainsi une ouverture timide alors que partout dans le monde le modèle du parti unique s’essouffle avant d’éclater, en 1989, avec la chute du mur de Berlin. Les événements sanglants d’octobre 1988 et l’adoption d’une constitution pluraliste 1989, ont contraint le système à une plus grande ouverture. Cette phase correspond à la courte et dense période de deux ans (1990-1992) au cours de laquelle la télévision a vécu son âge d’or sous la pression des partis de l’opposition. La presse écrite étatique a vu son statut remis en cause puisque sa disparition totale étai programmée. Sous la double pression de la difficile conjoncture économique et sociale, des formations politiques et des associations, à l’intérieur comme à l’extérieur, le système éclate mais refuse de se suicider. Ne supportant plus les demandes et les exigences de la société, des partis, des associations et des syndicats, le système se referme. L’irréversibilité de la libéralisation de la presse écrite a été possible parce qu’elle a constitué le seul « argument démocratique » a la déferlante totalitaire puisque dans sa confrontation avec le terrorisme, l’Etat a trouvé la justification de la fermeture du champ politique et médiatique. C’est aussi l’époque durant laquelle la télévision et la radio opère un repli, de même d’ailleurs que la presse étatique. C’est aussi l’époque durant laquelle le public, de moins en moins confiant dans les médias d’Etat, surtout dans les programmes d’information, se tourne vers les chaînes étrangères, arabes et européennes qui commençaient à remplir le ciel. Depuis, l’Etat conserve la main haute sur la radio et la télévision, l’une comme l’autre relevant formellement du ministère de la Communication. Alors que la presse dite publique relève du Groupe de Presse et de Communication qui lui-même relève du Premier ministère, du moins jusqu’en janvier 2008. Les modalités de financement et de nomination de responsables de ces médias indiquent clairement qu’il s’agit d’organes gouvernementaux et ne répondent pas aux critères essentiels d’un service public même si ceux-ci prétendent assurer un service public au nom duquel des aberrations sont commises comme le fait de juger inutile de donner ou de montrer par exemple des informations sur la grève des enseignants en janvier 2006 alors que pratiquement toute la population du pays est directement concernée, cela, tout simplement parce que pour le gouvernement, cette grève est censée ne pas exister…Il en est de même en janvier 2007, au moment de l’ouverture du procès Khalifa au tribunal de Blida, la chaîne décide d’occulter totalement l’événement et demeura «sourde à la lancinante demande sociale d’en être honnêtement informé».                                                                     

Les notes :

(1)-Le 28 octobre 1962, la RTA se substitue à l’Office de Radio-Télévision française (ORTF). Ne disposant que de moyens très limités et de quelques stations de diffusion dont la capacité ne dépassait guère 500 watts, Aïssa Messaoudi, le speaker vedette de la Voix de l’Algérie combattante, la prendra en main et dès le 5 janvier 1963, les activités radiophoniques ont repris normalement. La première équipe dirigeante de la RTA est composée du duo Aïssa Messaoudi, directeur général et Abderrahmane Laghouati, directeur des services techniques (et futur directeur général).

(2)-Leïla Boutaleb, Radio algérienne : témoignage et vécu professionnel 1963-1995, intervention au colloque intitulé « l’Algérie : bilan d’une évolution chaotique », organisé par l’université Laval (Canada) en 1998.

(3)-Ces chiffres ont été donnés par le ministre de la Communication, Hachemi Djiar, lors de l’ouverture du 3e séminaire de Béjaïa le 19 août 2006. A la même occasion, le ministre dire que « 127 milliards de centimes ont été déboursés sur le budget d’équipement pour le développement des radios locales » (El Watan du 20 août 2006, p. 32)

(4)-Mme Zahira Yahi, en tant qu’assistante du DG de l’ENRS, explique ainsi les « priorités » de la mise en place des radios locales et leurs grilles de programmes : la création des radios locales a répondu à quatre paramètres principaux : 1-Les zones frontalières (Tindouf, El Oued, Tébessa et Illizi) très exposées à la désinformation et dont les populations doivent bénéficier d’information, de sollicitude et d’intérêt ;2-Les zones enclavées pour éviter que le sentiment d’être de laissés-pour-compte ne gagne les populations ; 3-Le tissu culturel à préserver dans son homogénéité ; 4-Les grands pôles industriels et commerciaux, foyers de cultures et de populations diverses (pour émettre et recevoir entre la capitale et ces foyers). Quant aux grilles de programmes, elles sont « axées en majeure partie sur des informations locales au sens large, sur les particularités culturelles de la région, sur des émissions socio-éducatives et religieuses. Mission qui était dévolue essentiellement aux chaînes nationales. Aujourd’hui, les radios locales reçoivent et produisent généralement toutes leurs émissions. Une interactivité s’est créé avec les chaînes nationales, soit en produisant pour elles et à leur demande, soit en échangeant des programmes artistiques» (La radio : mes mutations d’un média populaire. Communication donnée lors de la journée d’études sur la production audiovisuelle le 5 novembre 1996 à Alger)

(5)-Les chiffres (ainsi que les missions) ont été avancés par le ministre de la Communication, Boudjamaâ Haichour, à l’ouverture des travaux du deuxième séminaire de Ouargla, le 29 avril 2005.

(6)-Le projet de sa création date de novembre 1998.

(7)-Avec la tenue en mars 2006 à Alger des journées d’étude sur la TNT, organisée par l’ENTV et la TDA avec la collaboration de l’Union européenne de radiotélévision (El Moudjahid, le 21 mars 2006)

(8)-« Lancement de trois chaînes thématiques l’année prochaine », El Moudjahid, le 21 mars 2006.

(9)-le ministre de l’époque, Bachir Rouis, envisageait le lancement d’un quotidien qui s’appellerait Le Soir d’Algérie (selon le témoignage de Boukhalfa Amazit recueilli par l’auteur) avec une autonomie rédactionnelle et financière mais du fait de certaines résistances, la formule retenue est la publication d’un journal du soir qui dépend de la direction  d’El Moudjahid.   

 

(*)-Achour CHeurfi, La presse algérienne : genèse, conflits et défis, Casbah Editions, Alger, septembre 2010, pp.89-148.